7/02/2017

La question préjudicielle: Un pont entre la justice nationale et la justice européenne

L’objectif de cet article est d’appréhender l’implication de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) dans les deux affaires Achbita/G4S Bougnaoui/Micropole dont les faits et les procédures ont été exposés auparavant.


Au premier lieu, il convient de rappeler que le juge est investi d’une mission qui se résume en ces mots : « dire le droit ». A cet effet, il est souvent appelé à interpréter un texte légal (loi par exemple) ou extra-légal (règlement intérieur d’une entreprise ou contrat de travail..).

Lorsque l’affaire, soumise au juge national, implique l’application d’une ou de plusieurs dispositions non-intelligibles du droit européen, le juge peut ou doit, selon le cas, décider de surseoir à statuer en demandant à la CJUE d’interpréter lesdites dispositions ; cette demande s’inscrit dans une procédure dénommée la question préjudicielle ou le renvoi préjudiciel.

La question préjudicielle
Chargée d’assurer le respect du droit, la CJUE est compétente entre autres pour interpréter le droit européen sur la base d’une question préjudicielle. Il s’agit d’une procédure qui permet à une juridiction d’un Etat membre, avant de rendre son jugement définitif, de saisir la CJUE pour lui fournir une interprétation d’une disposition du droit de l’Union européenne.
C’est le cas par exemple de l’affaire Achbita/G4S où le juge belge pose à la CJUE la question préjudicielle suivante : « L’article 2, paragraphe 2, sous a), de la directive 2000/78 doit-il être interprété en ce sens que l’interdiction de porter un foulard en tant que musulmane sur le lieu de travail ne constitue pas une discrimination directe lorsque la règle en vigueur chez l’employeur interdit à tous les travailleurs de porter sur le lieu de travail des signes extérieurs de convictions politiques, philosophiques ou religieuses ? »
Ou le cas de l’affaire Bougnaoui/Micropole où le juge français pose à la CJUE la question préjudicielle suivante : « Les dispositions de l’article 4, paragraphe 1, de la directive2000/78 doivent-elles être interprétées en ce sens que constitue une exigence professionnelle essentielle et déterminante, en raison de la nature d’une activité professionnelle ou des conditions de son exercice, le souhait d’un client d’une société de conseils informatiques de ne plus voir les prestations de service informatiques de cette société assurées par une salariée, ingénieur d’études, portant un foulard islamique ? »

Cette procédure est instituée par l’article 267 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Pareille procédure, si elle est correctement mise en œuvre, garantit une application uniforme du droit de l'Union européenne. Elle est censée être un moyen garantissant l’efficacité de la justice et la sécurité juridique. Son régime juridique est encore encadré par les articles 93 à 118 du règlement de procédure de la CJUE. C’est une procédure facultative à l’égard des juridictions ne statuant pas en dernier ressort.

D’après l’article 91 du règlement de procédure de la CJUE, l'arrêt a une force obligatoire à compter du jour de son prononcé. Il en résulte qu’il jouit de l’autorité de la chose jugée et s’impose aux juridictions nationales des États membres au même titre que la juridiction nationale, auteure de la question préjudicielle. De même, les décisions, rendues dans le cadre d’un renvoi préjudiciel, ne font pas l’objet d’une demande d’interprétation. Il appartient aux juridictions nationales d'apprécier si elles s’estiment suffisamment éclairées par une décision préjudicielle, ou s’il leur apparaît nécessaire de saisir à nouveau la Cour (Voir articles 103 et 104 du règlement de procédure de la CJUE).

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