A partir de cet article commence l’examen du fond des deux
arrêts de la CJUE rendus dans l’affaire belge C-157/15 Achbita/ G4S et l’affairefrançaise C-188/15 Bougnaoui / Micropole Univers. Cet examen porte d’abord sur une
analyse
conceptuelle des articles 1, 2, 10 paragraphe 1, et 4 paragraphe 1 de
la directive 2000/78. L’objectif en est de comprendre les fondements juridiques
du régime de lutte contre la discrimination et jalonner le terrain à la
discussion des deux arrêts rendus par la CJUE dans les affaires susmentionnées.
D’ailleurs ces arrêts, ainsi que les conclusions y afférentes des deux avocats
généraux sont fondés principalement sur ces articles plus que d’autres. D’où
l’intérêt de l’accent qui sera mis sur eux dans les prochains articles avant
d’interroger ensuite l’application par la CJUE de ces articles.
Nous avons établi précédemment que la volonté d’instituer un
espace « de paix et de stabilité » est traduite par la mise en place
du droit et des institutions européens. Ces valeurs, poursuivies par l’UE,
sont à rechercher non seulement dans la scène et la période de guère mais aussi
ailleurs et en toute période à l’école, dans la famille, sur la voie publique, etc.
L’entreprise, acteur économique moral, est aussi un espace social qui mérite
d’y promouvoir les valeurs de paix et de stabilité. D’ailleurs, c’est un
domaine qui contribue dans une large mesure à la pleine participation des
citoyens à la vie économique, culturelle et sociale, ainsi qu'à
l'épanouissement personnel (voir considérant 9 de la directive 2000/78.). Sachant
encore qu’aujourd’hui on dépense plus de temps à l’entreprise où cohabite des
femmes et des hommes, des personnes âgées et des personnes moins âgées, des personnes
de convictions ou de religions différentes et surtout des employeurs forts
disposant de l’autorité à côté des salariés soumis dépourvus d’autorité.
Il va sans dire que les relations dans l’entreprise sont à
forts enjeux économique, sociale et culturelle voir même politique -politique européenne-.
Elle se pose alors la question de la régulation de l’autorité exercée par
les employeurs sur les travailleurs de façon à protéger et équilibrer les
intérêts en jeu.
C’est à partir de là qu’on arrive à adhérer au choix
intelligent du législateur européen de concevoir un texte juridique dédié au domaine
de l’emploi et du travail, à savoir la directive 2000/78. Il vise ainsi à
protéger les personnes qui vivent sur le territoire de l’entreprise contre
les actes discriminatoires émanant des uns contre les autres ; actes
incompatibles avec un espace de paix et de stabilité tant bien que mal
construit par les européens ; actes qui risquent en plus de nuire à la participation
des citoyens à la vie économique et à l'épanouissement personnel.
Effectivement, d’après l’article premier de la directive
2000/78, ses dispositions définissent un cadre juridique de travail pour lutter
contre la discrimination. Elles s’appliquent au domaine de l’emploi et du
travail, aussi bien au secteur public qu’au secteur privé, en ce qui concerne
l’accès à l’emploi, les conditions de travail, la rémunération, le
licenciement, etc.
L’objectif en est de garantir la mise en œuvre effective du
principe de l'égalité de traitement tel que prévu par le Traité instituant la
Communauté européenne. L’égalité de traitement dont il s’agit ici est
considérée nonobstant la religion ou la conviction choisie par les
travailleurs, l'handicap qu’ils éprouvent ainsi que leur âge ou orientation
sexuelle.
Ceci est exprimé par l’article
premier de la directive 2000/78 comme suit :
« La présente directive a pour objet d'établir un cadre général pour lutter contre la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, l'handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle, en ce qui concerne l'emploi et le travail, en vue de mettre en œuvre, dans les États membres, le principe de l'égalité de traitement. »
D’abord, il découle de la lecture de ce premier article que
la directive 2000/78 a un objet et une finalité. Son objet est de mettre en
place un régime juridique de lutte contre la discrimination en matière d’emploi
et de travail. Sa finalité est la mise en œuvre du principe de l’égalité de
traitement.
En un mot, les européens veulent mettre en œuvre le principe
de l’égalité de traitement et ce travail passe concrètement par la lutte contre
le parasite de la discrimination. La discrimination est prohibée dans les
rapports de l’entreprise avec ses travailleurs nonobstant sa cause cible :
religion ou convictions, handicap, âge ou orientation sexuelle**.
Ainsi, le législateur œuvre pour la protection des libertés
individuelles dont le droit de religion car elle constitue une cible
potentielle des auteurs des actes discriminatoires au sein de l’entreprise
comme ailleurs. Le législateur donne
ainsi à la liberté de religion une place privilégiée sur le territoire et
l’espace de l’entreprise où règne la liberté d’entreprendre. Il s’agit de
protéger la liberté des chercheurs d’emploi et des travailleurs dépourvus de
pouvoir devant leurs recruteurs potentiels et employeurs bourrés d’autorité. Cette liberté de religion implique bien
entendu tant le droit « d’intérioriser » sa religion que le droit « d’extérioriser
ou de manifester » sa religion.
Dans le prochain article, je poursuivrai l’examen juridique
des dispositions phares de la directive à savoir les articles 2 et 10
paragraphe 1, et ce, avant de se pencher ultérieurement sur l’article 4
paragraphe 1.
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** Pour des considérations pédagogiques et de cohérence avec
l’objet des deux arrêts, je vais souvent me contenter de citer le motif de
religion sans avoir la volonté de négliger les autres motifs (âges, convictions,
orientation sexuelle, handicap) ou prioriser les uns par rapport aux autres.
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